Les Yeux de la Girafe

Stanley et Livingstone, deux aventuriers au cœur du continent africain

L’Afrique que l’on connaît aujourd’hui n’a rien à voir avec celle que les explorateurs européens ont découvert à partir du XVe siècle. Que ce soit dans le but d’en tirer de nouvelles richesses ou de la coloniser pour étendre leurs territoires, elle n’a cessé de fasciner les étrangers qui y posaient le pied pour la première fois. Et il fallait à l’époque à ces explorateurs une bonne dose de courage, d’inconscience, voire une soif de reconnaissance ou un ego démesurés pour se lancer à l’assaut de ses terres hostiles et parfois encore vierges, faisant de l’inconnu leur quotidien durant des mois et même des années.

David Livingstone et Henry Stanley en sont la parfaite illustration. Leurs noms sont toujours présents dans la conscience collective. Le récit de leurs aventures et de leur mythique rencontre nous est parvenu notamment grâce aux carnets de voyages, aux lettres et aux publications dans la presse de l’époque. Leurs expéditions n’ont malheureusement pas fait l’objet de photographies, la technique n’en étant encore qu’à ses balbutiements. De nombreux dessins et gravures réalisés a posteriori ont représenté les événements, de manière plus ou moins fantaisiste d’ailleurs. Cette imagerie, que l’on pourrait qualifier « d’Épinal », a néanmoins contribué à relater et diffuser les aventures de ces deux héros de l’exploration de même qu’à révéler aux yeux du monde le cœur du continent africain.

Livingstone, le missionnaire explorateur

Des origines modestes et un rêve de voyages

Né le 19 mars 1813 à Blantyre en Écosse, David Livingstone est issu d’une famille protestante modeste. À 10 ans, il quitte l’école et commence à travailler dans une filature de coton. Déjà très jeune il fait preuve d’une grande persévérance et d’une volonté d’apprendre peu commune. Il poursuit son instruction en suivant des cours du soir tout en soutenant sa famille (à l’époque c’était la semaine de soixante-quinze heures !). Ces qualités forgeront l’explorateur infatigable qu’il deviendra plus tard.

Curieux de tout, il se passionne pour les sciences et rêve de voyager. Pour y parvenir il projette de devenir missionnaire en Chine. À l’âge de 23 ans, il entre à l’université de Glasgow où il étudie la médecine et la théologie. Mais un conflit entre la Chine et le Royaume-Uni l’oblige à changer ses plans.

Premier voyage : Afrique du Sud, Botswana, Zambie, Angola, Mozambique et Zimbabwe (1841-1856)

Ordonné pasteur et envoyé comme missionnaire en Afrique par la London Missionary Society, il débarque dans la colonie du Cap en 1841 pour rejoindre la mission de Robert Moffat à Kuruman, 800 km à l’intérieur des terres. Il y arrive influencé par l’abolitionniste Thomas Fowell Buxton, convaincu que l’introduction du commerce et du christianisme pourrait abolir la traite des esclaves africains. Mais il est rapidement déçu par les résultats de la mission et la méconnaissance de la langue des populations locales par les missionnaires.

C’est ainsi que Livingstone le missionnaire et médecin va petit à petit se muer en Livingstone l’explorateur. Kuruman étant situé en limite des terres inexplorées, il est envoyé plus au nord dans le but d’évangéliser de nouvelles populations. Il part en août 1843 accompagné de Mary, sa future épouse et fille de Robert Moffat, et parcourt de grandes distances dans des régions inhospitalières. Il établit son premier avant-poste de mission à Mabotswa en 1844, où il réchappera de justesse à une attaque de lion qui le laissera partiellement invalide du bras gauche. En janvier 1845 il épouse Mary Moffat, qui lui donnera quatre enfants.

Bien qu’étant un piètre évangélisateur (on ne lui reconnaîtra qu’un seul converti), Livingstone fondera trois missions au cours de ce premier voyage en Afrique. Ne se satisfaisant pas d’une vie sédentaire, il s’enfonce toujours plus loin dans les terres inconnues. Ces conditions de vie étant trop difficiles pour sa femme et ses enfants, il les renvoie en 1849 à Kuruman. Ceux-ci repartiront plus tard au Royaume-Uni. David se lance alors dans l’exploration du centre sud du continent africain.

Il va découvrir et cartographier le désert du Kalahari, qu’il traverse en 1849, puis le lac Ngami la même année. En 1851 c’est la découverte du fleuve Zambèze et enfin les célèbres chutes qu’il baptisera du nom de la reine Victoria en 1855 (voir article ICI). Il sera également le premier Européen à traverser l’Afrique d’ouest et est (de Saint-Paul de Loanda en 1854 à Quelimane en 1856).

Son retour au Royaume-Uni en 1856 sera triomphal. David Livingstone, devenu une célébrité, est reçu par la reine Victoria ; son image d’explorateur surpasse largement celle du missionnaire, vocation qui restera pourtant toujours présente à son esprit. En 1857 il publie un livre sur ses explorations, Missionary Travels and Researches in South Africa, qui aura un grand succès.

« Je sais que dans quelques années je m’éteindrai sur ce continent, maintenant ouvert ; ne le laissez pas se refermer ! Je retourne en Afrique pour tenter d’ouvrir une voie au commerce et au christianisme ; poursuivrez-vous l’œuvre que j’ai commencée ? Je vous la confie. »

Déclaration de David Livingstone devant un groupe d’étudiants de l’université de Cambridge en 1857.

 

Deuxième voyage : le bassin du Zambèze (1858-1864)

Livingstone repart en Afrique en 1858, mais dans des conditions différentes de celles de son premier séjour. La London Missionary Society ne voulant plus payer pour ses expéditions, c’est le gouvernement britannique qui, augurant des bénéfices qu’il pourrait tirer de l’ouverture de nouvelles voies commerciales, le financera.

Ce second voyage aura également un caractère scientifique puisque l’explorateur part accompagné d’un géologue, d’un botaniste, d’un physicien et d’un dessinateur. Partiront aussi son épouse, Mary, et son frère, le révérend Charles Livingstone (1821-1873), qui sera assistant et secrétaire de David durant l’expédition.

Le but de cette longue et coûteuse exploration du Zambèze et de ses affluents est de trouver une voie navigable vers le cœur de l’Afrique. Après des débuts prometteurs, l’expédition se complique lorsqu’une série de rapides rendent le Zambèze impraticable. Une tentative de trouver une autre voie sur le Shire échoue également. Livingstone persévère et arrive en septembre 1859 jusqu’au lac Nyassa (lac Malawi), région fertile mais très instable en raison de luttes entre les tribus locales. Les maladies tropicales feront des victimes dans son équipe ; Mary Livingstone sera également emportée par la malaria le 27 avril 1862, puis enterrée à Shupanga (Mozambique) sous un baobab.

L’embouchure du Zambèze est atteinte en février 1864, mais l’explorateur a échoué dans sa mission. Il a non seulement perdu son épouse mais aucune voie navigable n’a été ouverte. Le gouvernement britannique lui coupe les vivres et le rappelle à Londres. En disgrâce à son retour, il se retrouve isolé. Il publiera tout de même en 1865 avec son frère Charles Narrative of an Expedition to the Zambesi and Its Tributaries.

Troisième et dernier voyage : les rives du lac Tanganyika (1866-1873)

Malgré ces revers, Livingstone pense toujours pouvoir trouver la route fluviale tant espérée. Il repart en expédition, mais cette fois avec de faibles moyens et sans soutient d’aucune sorte. Il arrive à Zanzibar en janvier 1866 avec comme objectif de découvrir les sources du Nil — appelées « fontaines d’Hérodote » — et résoudre ainsi le mystère de la séparation des eaux entre le bassin du Congo, s’écoulant vers l’Atlantique, et le bassin du Nil, s’écoulant vers la Méditerranée.

Avec une équipe restreinte de porteurs et peu d’équipement, il s’enfonce péniblement au cœur du continent. En contradiction avec ses principes, il est obligé de voyager avec des marchands d’esclaves arabes pour assurer sa sécurité. Il rallie le lac Tanganyika en mars 1867 puis quelques autres lacs de la région. Deux ans plus tard, atteint d’une pneumonie, il arrive à Ujiji (Tanzanie).

En juillet 1871 il assiste impuissant à un terrible massacre de plusieurs centaines de villageois perpétré par des esclavagistes sur le marché du village de Nyangwe (RDC). Très choqué, il relatera les faits en écrivant avec du jus de baie sur un vieux journal puis, malade et abandonné par ses porteurs (exceptés les fidèles Susi et Chuma) il renoncera à sa quête et se retirera à Ujiji en octobre 1871.

Mais depuis plusieurs années déjà, le monde extérieur a perdu tout contact avec l’explorateur. Au Royaume-Uni on le croit mort ; la nouvelle est même publiée à plusieurs reprises dans la presse, puis démentie. Finalement, c’est le New York Herald qui décide de lancer une expédition en Afrique et envoie un journaliste, Henry Morton Stanley, à sa recherche.

Stanley, le journaliste explorateur

Fuir une enfance difficile

Henry Morton Stanley, de son vrai nom John Rowlands, est né le 28 janvier 1841 à Denbigh au pays de Galles. Enfant naturel, il n’a jamais connu son père qu’il croit mort et dont l’identité lui a été cachée par sa mère. Abandonné par elle, John sera élevé par son grand-père jusqu’à ce que celui-ci décède. Il n’a que 5 ans lorsqu’il se retrouve dans une workhouse, sorte de maison-orphelinat où les pauvres peuvent travailler. Il y acquiert de bonnes connaissances scolaires mais les conditions de vie sont particulièrement difficiles. Vivant au contact de délinquants, il sera victime de mauvais traitements et probablement de sévices sexuels. Il fuit l’institution en 1856 puis embarque à 17 ans comme mousse sur un voilier en partance pour La Nouvelle-Orléans.

Un nouveau départ en Amérique

Stanley à 20 ans.

Là il travaille pour un négociant en coton nommé Henry Hope Stanley, dont il prendra le nom plus tard. En 1861, la guerre de Sécession éclate. Engagé dans l’armée sudiste, Henry Stanley est fait prisonnier en 1862, puis passera dans le camp adverse en échange de sa libération. Réformé de l’armée nordiste pour cause de maladie, il travaillera dans la marine de 1863 à 1865.

Un reporter du XIXe siècle

Un peu avant la fin de la guerre de Sécession, Stanley voyage dans l’Ouest américain en tant que correspondant indépendant pour un journal de Saint-Louis. Il participe aux guerres indiennes puis devient envoyé spécial pour le New York Herald en 1867, qui l’enverra couvrir des événements en Abyssinie, en Égypte, à Malte et en Espagne notamment.

James Gordon Bennet, directeur du New York Herald, le rappelle et lui confie la mission de retrouver le missionnaire explorateur David Livingstone parti chercher les sources du Nil et porté disparu en Afrique. L’expédition, financée par le journal, compte presque 200 hommes — des porteurs africains et seulement 2 Britanniques — et emmène 6 tonnes de matériel.

La rencontre Stanley-Livingstone ou l’improbable dialogue

Stanley se rend en Afrique en passant par l’Inde. Il part de Zanzibar en janvier 1871 déterminé à ramener un « scoop ». Les conditions sont difficiles. Après de longs mois à enquêter et à parcourir 1 500 km sans la moindre carte, il arrive enfin le 10 novembre à Ujiji, au bord du lac Tanganyika, où se trouverait selon une rumeur un vieil homme blanc qui a toutes les chances d’être David Livingstone. Stanley bien qu’éprouvé par le voyage se prépare à la rencontre, qu’il sait historique. Lui et les membres de son expédition revêtent les plus beaux vêtements qu’il leur restent. En s’avançant vers le missionnaire, malade et affamé, Stanley ôte son chapeau et prononce cette phrase restée célèbre dans le monde entier et qui figure dans tous les livres d’histoire :

« Dr Livingstone, I presume? »

Et à laquelle Livingstone aurait répondu :

« Yes, that is my name. »

Une des nombreuses figurations idéalisées de la rencontre entre Stanley et Livingstone.

Cependant, une récente étude a révélé que ce dialogue échangé entre les deux hommes, trop policé et trop « British » pour être réaliste, surtout au regard des circonstances, avait très probablement été inventé par Stanley pour l’article qu’il a écrit dans le New York Herald. Les pages de son carnet dans lesquelles la rencontre était relatée ont opportunément disparu… et le compte-rendu de Livingstone ne mentionne pas non plus ces mots.

Mort de Livingstone en terre africaine

Stanley reste quelques mois aux côtés de Livingstone à explorer, de nouveau. Les deux hommes se lient d’amitié. Le journaliste s’apprête à rentrer en Europe, sans Livingstone qui souhaite rester. Ce dernier lui confie son journal afin qu’il soit diffusé et que le monde sache ce qui s’est passé à Nyangwe.

Après le départ de Stanley en mars 1872, Livingstone repart en quête des sources du Nil, malgré une extrême fatigue et la maladie. En avril 1873 ses porteurs l’amène en civière jusqu’au village de Tshitambo près du lac de Bangwelo (actuelle Zambie). Il y décédera le 1er mai de la malaria et de la dysenterie. Il avait 60 ans.

Ses fidèles serviteurs africains enterreront ses entrailles au pied d’un arbre et embaumeront son corps. Il transporteront la dépouille sur des milliers de kilomètres durant huit mois jusqu’à la côte avant qu’un bateau ne la ramène jusqu’en Angleterre. Ce sera l’ultime voyage de Livingstone. Ses funérailles seront célébrées dans l’abbaye de Westminster à Londres le 12 avril 1874.

Stanley reprend le flambeau de l’exploration

Stanley l’explorateur photographié en studio.

À son retour, la parole de Stanley fut un temps mise en doute par la communauté scientifique lorsqu’il voulu faire la preuve qu’il avait retrouvé Livingstone. En manque de reconnaissance, il retourne en Afrique afin de poursuivre ce que le célèbre missionnaire n’avait pu terminer. Au contact de celui-ci durant des mois, le journaliste s’était découvert une vocation d’explorateur.

Financé par le New York Herald et le Daily Telegraph, il traverse le continent d’est en ouest au départ de Zanzibar en 1874, emmenant plus de 230 personnes avec lui (dont les deux tiers mourront ou déserteront) et un bateau en pièces détachées — le Lady Alice. Il explore entre autres le lac Victoria, l’Ouganda, la totalité des rives du lac Tanganyika et le cours du fleuve Congo, découvrant des chutes difficilement franchissables qu’il baptisera chutes Livingstone. L’expédition, périlleuse à bien des égards, atteindra la côte atlantique en août 1877. Stanley la racontera dans Through the Dark Continent, publié en 1878.

Transport du Lady Alice en pièces détachées.

Le roi Léopold II de Belgique, fasciné par les exploits de Stanley, l’engage en juin 1878 pour explorer durant plusieurs années le bassin du Congo et y développer des routes commerciales et des comptoirs afin d’y constituer un empire colonial. Pour y parvenir, l’explorateur emploie des méthodes douteuses avec les tribus locales, leur faisant signer des contrats qu’ils ne comprenaient pas pour les déposséder de leurs terres ou bien n’hésite pas à les malmener, ce qui ternira quelque peu sa réputation aux yeux de l’Angleterre. Qui plus est, l’usage de la force instauré au Congo par Léopold II se fait sous couvert de servir la science et lutter contre l’esclavage. En 1883, Stanley fonde Stanleyville (Kisangani) et un an plus tard fait du village de Kintambo la capitale de ce nouveau et immense royaume baptisée Léopoldville (Kinshasa).

Stanley en négociation avec le chef de Wangata au Congo (1885).

De 1886 à 1889, Stanley s’illustre dans l’expédition de sauvetage d’Emin Pacha, gouverneur de la province égyptienne d’Equatoria au sud du Soudan.

À son retour au Royaume-Uni en 1890 il épouse l’artiste Dorothy Tennant et entame une tournée de conférences. Il siégera à la Chambre des communes de 1895 à 1900 et sera fait chevalier en 1899. Il meurt le 10 mai 1904 à Londres.

Dorothy et Henry Stanley.

Stanley et Livingstone : deux visions différentes de l’Afrique

La littérature sur ces deux personnages hors du commun est abondante et il est bien difficile de faire un portrait fidèle de ce que fut réellement leur vie et de leurs exploits tant il y a eu d’études et d’interprétations de leurs écrits, sans parler des représentations peu réalistes qui ont illustré lesdits écrits. Ce qui est sûr en revanche, c’est que rien au départ ne laissait imaginer qu’ils allaient un jour se rencontrer, de surcroît si loin de leurs pays d’origine — surtout quand on sait que l’année où David Livingstone a mit le pied en Afrique pour la première fois (1841) est également celle où Henry Stanley est venu au monde…

Si Livingstone et Stanley appartiennent à la famille des grands explorateurs, c’est avant tout parce qu’ils avaient tous les deux une volonté et une endurance rares, acquises dès le plus jeune âge en tentant de s’extirper du milieu modeste dans lequel chacun a grandi. La curiosité, la soif de connaissances, l’envie de voyager ou d’être reconnu sont autant de motivations qui les ont incités à toujours repousser leurs limites.

Néanmoins, lorsqu’on y regarde de plus près, l’un et l’autre n’avaient pas la même vision de l’Afrique. Livingstone, lui, s’y projetait avec comme but d’apporter « quelque chose » aux populations locales. Il aimait les Africains et s’attachait à communiquer avec eux en parlant leurs langues. Et bien que sa mission initiale était de les évangéliser, ce qu’il ne réussit pas à faire, il eut à cœur de les soigner et de les faire accéder à l’éducation et à la « civilisation ». C’était un idéaliste, avec sa part de naïveté, qui pensait pouvoir mettre fin à l’esclavage, toujours pratiqué en Afrique à l’époque.

Quant à Stanley, avec son expérience passée de soldat-baroudeur-journaliste et un caractère très marqué par l’abandon, la violence et la délinquance côtoyés dans son enfance, l’Afrique était surtout un moyen d’accéder à la reconnaissance, voire à la gloire. Et c’est Livingstone qui, indirectement, lui aura servi de tremplin pour y parvenir car sans la fameuse rencontre, les choses auraient probablement été différentes. Par ailleurs, contrairement à Livingstone, le journaliste du New York Herald considérait les Noirs comme une race inférieure et ne se comportait pas comme un tendre avec eux ; il a toujours eu une mauvaise réputation. C’est à lui que l’on doit l’expression « le continent noir » pour désigner l’Afrique.

Stanley exerçant des menaces sur ses porteurs.

 

Au vu de ces approches si divergentes du continent africain, on peut s’étonner du fait que Livingstone et Stanley aient pu sympathiser durant les quelques mois passés ensemble.

Quel héritage ont-ils laissé ?

Être explorateur au XIXe siècle n’était pas sans conséquences. David Livingstone y a laissé la vie mais sa passion a également mis à rude épreuve sa famille. Il fut un père absent pour ses enfants et son épouse, Mary, qui l’a suivi dans certaines expéditions (même lorsqu’elle était enceinte !) n’y a pas survécu.

Les voyages de ces deux aventuriers de l’époque victorienne ont permis aux Européens d’avoir une meilleure connaissance de cette partie de l’Afrique, notamment en matière de géographie car jusqu’alors seules les côtes étaient connues ; le cœur du continent figurait comme une zone vierge sur les cartes.

Carte de l’Afrique vers 1805.

Grâce à Livingstone, des progrès ont été réalisés en matière de lutte contre les maladies tropicales (développement de l’usage de la quinine). Son souhait le plus cher d’abolir l’esclavage, qui lui vaut aujourd’hui encore la sympathie des pays qu’il a traversés, n’a pas été exaucé de son vivant. Néanmoins, son témoignage a permis la signature d’un traité entre le Royaume-Uni et le sultan de Zanzibar clôturant le dernier marché libre aux esclaves en juin 1873.

Le revers de la médaille, car il y en a un, c’est que l’ouverture de routes commerciales au centre de l’Afrique a débouché aussitôt sur la colonisation de ces territoires et l’exploitation de ses richesses par les Européens. Loin de profiter aux populations locales, comme Livingstone l’imaginait, ce fut au contraire le début d’une période sombre, en particulier pour le Congo — ce en quoi Henry Stanley, qui ne s’encombrait pas de considérations morales, porte une grande part de responsabilité. En « livrant sur un plateau » ce pays au roi Léopold II de Belgique, avide d’enrichissement personnel, il a provoqué la mort de nombreuses personnes et s’est rendu complice et même acteur de nombreuses exactions.

Exécution d’esclaves, Equator Station, Congo (1885).

QUELQUES SOURCES

David Livingstone

Henry Stanley


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